
Aujourd’hui, 30 mars 2012, les mélomanes se souviennent le plus du chanteur tunisien Ali Riahi, qui aurait eu cent ans, jour pour jour. Il était né le 30 mars 1912 et en ce même mois, il partait Í jamais le 27 mars 1970, terrassé par une crise cardiaque sur la scène du Théatre municipal de Tunis. Une mort qu’il avait souhaitée quelques jours auparavant au micro de la radio tunisienne.
Ali Riahi, ou « Sid’Ali, comme se plaisaient Í l’appeler ses amis et ses fans, avait vécu pour l’art de la chanson et de la composition, Í une époque o͹ il était difficile, sinon impossible de s’y adonner. Ce métier d’artiste était, en effet, très mal vu et avait valu Í notre Ali Riahi bien des problèmes au sein de sa famille. Auprès des artistes de son époque, il était aimé et apprécié, mais n’avait pu, au départ, acquérir la satisfaction du public de la capitale. Son premier concert en solo, qu’il avait donné au Palais des Sociétés Françaises, en 1936, l’actuelle maison de la culture Ibn Rachiq, fut un bide. Pourtant, notre chanteur était convaincu de son projet et voulait accéder Í la réussite et Í la gloire. N’était-il pas le premier chanteur tunisien Í avoir donné un concert public en solo ? « Motreb El Khadhra », surnom que lui avait attribué le poète Mahmoud Bourguiba, son compagnon de parcours, ne voulait pas s’arrêter lÍ , lui qui avait appris les ABC de la musique auprès, tout d’abord, de Cheikh Abdelaziz Jemaͯl, une école musicale Í part entière et Í la Rachidia, par la suite. Autodidacte, Ali Riahi ne lisait, ni n’écrivait le solfège. Pourtant, son grand talent lui avait valu d’atteindre un très haut niveau artistique et d’enregistrer ses chansons Í la radio et en France chez Pathé Marconi. Il avait même enregistré plusieurs de ses œuvres connues ou inconnues Í la radio algérienne. Ses voyages dans les pays du Maghreb et au Machreq, o͹ il avait rencontré Mohamed Abdelwahab, Férid Latrache et Abdelhalim Hafedh, étaient fréquents. Pourtant, il craignait l’avion ! De son vivant, Ali Riahi n’était pas arrivé Í atteindre le succès qu’il avait enregistré depuis qu’il a quitté ce monde. Il chantait le plus dans les cérémonies de mariage et tenait toujours Í son élégance, devenue légendaire, depuis, emboitant le pas aux artistes français de l’époque des années trente et quarante du siècle dernier ; comme les chanteurs Maurice Chevalier, Charles Trenet, Tino Rossi et plusieurs chansonniers. Et c’était comme si une nouvelle vedette venait de naÍ®tre après sa mort, Í cinquante huit ans. « C’est dur de mourir au printemps », disait Jacques Brel. L’œuvre d’Ali Riahi restera toujours vivante dans le cœur de tous ceux qui apprécient la chanson tunisienne qui nous ressemble ; celle devenue éternelle et que les générations reprendront.
B.L.