« Hkayet Tounsiya » (Histoires tunisiennes) De Nada Mezni Hfaiedh

Premier long-métrage de la réalisatrice tunisienne Nada Mezni Hfaiedh : « Hkeyet Tounsiya » a été projeté récemment dans le cadre des Journée

« Hkayet Tounsiya » (Histoires tunisiennes) De Nada Mezni Hfaiedh

Elles disent beaucoup de vérités
Premier long-métrage de la réalisatrice tunisienne Nada Mezni Hfaiedh : « Hkeyet Tounsiya » a été projeté récemment dans le cadre des Journées du cinéma européen, après avoir provoqué autour de lui la polémique et les histoires les plus drÍ´les et invraisemblables, par Facebook interposé. Cela a provoqué un raz-de marée des spectateurs, lors de sa projection en nocturne Í  la salle « L’Alhambra », Í  la Marsa et le calvaire pour y accéder. Et malheureusement, le public ne bouge, pour aller voir un film tunisien, ou autre, que lorsque ce dernier suscite des interrogations et a été tourné sans fard, ni rajout, pour ne point cacher la vérité. Et si Diogène a cherché la vérité, ce film la dit, tout simplement. Est-ce ainsi que les salles obscures retrouveraient leur public, parti on ne sait o͹ ? On ne le dit pas, par respect pour son choix. Pendant les autres séances, dans la même salle et dans le même cadre des Journées du cinéma européen, une cinquantaine de spectateurs, au maximum, s’étaient déplacés. « Hkayet Tounsiya » est un film Í  la fois étonnant et audacieux ; dans la mesure o͹ il met Í  nu les problèmes des jeunes couples dans la Tunisie d’aujourd’hui. Cela pourrait choquer, ou plaire, selon l’angle Í  travers lequel, on irait le voir. Les déceptions amoureuses, l’insouciance, l’union libre, le mariage forcé et d’intérêt mercantile ou pas, les tromperies, les secrets et les dessous de la High-society…Tout est présent dans cette première œuvre, qui n’est pas sans coller aux réalités politiques et socio-économiques du pays, avant et après la révolution du 14 janvier 2011. Et ce qui étonne le plus, c’est que ce film a été tourné, nous dit-on, bien avant la révolution. La réalisatrice était-elle visionnaire, alors ? Trop de points de ressemblance s’y retrouvent, en effet. Le fossé énorme qui sépare les gens riches et ceux pauvres et plus pauvres encore, est savamment décrit Í  travers la vie quotidienne menée par ces deux composantes de la société tunisienne. Et au départ, la réalisatrice affirme qu’il s’agissait d’un documentaire, qui a vite tourné Í  la fiction. On ne comprendra pas pourquoi avait-elle alors choisi des comédiens professionnels et non professionnels pour le documentaire ? Des histoires vraies, Í  la manière des réalisateurs iraniens ? Ou que le film a nécessité leur présence sous sa nouvelle version, voire son nouveau genre. Le rythme soutenu des événements accroche, ajouté Í  la narration en off et ironique de l’un des protagonistes : un chauffeur de taxi, qui perd son boulot et qui devient marchand ambulant poussant sa charrette de fruits. Une étonnante ressemblance avec le premier martyr et défunt de la révolution : Mohamed Bouazizi. D’autres personnages ; comme le trafiquant de drogue, le souteneur et le magouilleur, ne sont pas sans rappeler également des membres-voyous des familles régnantes, d’avant la révolution, qui détenaient tout sous la main et se croyaient les maÍ®tres incontestés de la Tunisie ! Les acteurs professionnels donnent la réplique Í  d’autres amateurs et non professionnels, qui se sont retrouvés pour la première fois devant la caméra. Ils n’avaient pas tous « la gueule de l’emploi » et c’est ce qui a donné des écarts dans le jeu de chacun d’eux. Certes, ils étaient dirigés, mais semblent s’être mis Í  cœur joie pour jouer des rÍ´les qui leur collaient parfaitement. Des rÍ´les qui ne laissaient pas indifférent. Une équipe jeune et dynamique qui a pu faire un film de plus de deux heures et qui renvoie Í  la femme évoluée, émancipée et qui tient son destin en main. Un film de femmes ? Absolument ! Car leurs secrets d’alcÍ´ve, parfois, sont divulgués, en toute simplicité ! Un genre et un langage cinématographique qui nous donne Í  respirer et Í  accepter mutuellement nos qualités et nos défauts. La musique Rock, Í  la tunisienne, donne également au film encore plus de beauté. Elle est signée Yasmine Azaiez, plus connue comme virtuose et génie du violon et qui fait ses premiers pas dans le jeu et la composition. B.L.