
La nouvelle pièce théatrale : « Khouya, libre ? » ou « Taxi », jouée récemment sur la scène du Théatre municipal de Tunis, raconte autrement la révolution tunisienne du 14 janvier 2011. Pour cela, rien n’est laissé au hasard : des petits détails, aux imprévus, Í l’évolution rapide des événements qui se sont succédé Í un rythme soutenu et qui étaient venus marquer l’histoire de la Tunisie. Un chauffeur de taxi y évoque, Í travers une narration pointue et sobre, Í la fois, son quotidien doux-amer, durant les premiers jours de la révolution. Le discours, comique Í souhait, y reste accrocheur.
Jamel Madani, sous la direction de Mounir Argui, y joue un texte qu’il a co-écrit avec Argui. C’est Í la fois un monologue d’un humour froid et un one man show qui respecte les règles élémentaires de ce genre théatral, un peu trop prisé par nos comédiens actuels. La parole, le jeu, la danse, la mimique et surtout l’interprétation de plusieurs rÍ´les, déterminent ce spectacle de plus d’une heure et demie. Les auteurs du texte valsent entre les sens de la liberté, selon qu’un taxi ne soit pas occupé et selon que le taximan reste coincé entre deux situations embarrassantes : celle de déclarer sa trouvaille oubliée par un client : une valise contenant un milliard, ou de l’emporter chez lui. Il choisira la première solution, parce qu’il est libre, dit-il dans la pièce. Un acte citoyen qui lui éviterait des tracas avec les autorités. C’est un homme qui vit seul, mais qui cÍ´toie des dizaines de clients, chaque jour. Sa solitude est immense après son divorce, aussi immense que la scène nue o͹ il a joué et essayé de l’occuper par ses déplacements incessants, ses tours et ses pas de danse. La chaise est le seul élément de décor qui l’accompagne durant toute la pièce. Une chaise rouge sur une scène qui l’est aussi. Lui, il porte un costume blanc et des chaussures blanches. C’est un écorché vif qui reçoit parfois les coups bas de ses clients. Il raconte ses histoires extraordinaires, aux plus petits détails hilarants. Il s’en plaint et fait toujours de la résistance, malgré tout. Aussi simple soit-elle, « Khouya, libre ? » rend hommage Í tous ceux et celles qui ont réalisé la révolution libératrice de la dictature et de l’oppression. De son cÍ´té, le chauffeur de taxi est toujours libre, bien qu’il soit occupé !
B.L.