
Révolution théatrale, aussi
C’est la pièce tunisienne : « Saheb Lahmar » de Fadhel Jaziri, qui a donné le coup d’envoi de la quinzième édition des Journées Théatrales de Carthage, vendredi dernier Í la coupole d’El Menzah. Un spectacle qui se voulait complet, mais qui nécessitait encore plus de répétitions, étant donné le caractère parfois indécis des comédiens, toutes générations confondues.
Sur une scène presque nue, on venait célébrer, par le biais du théatre, la révolution tunisienne, celle des braves ; comparable Í celle d’Abou Yazid Saheb Al Himar, qui, au dixième et onzième siècle de notre ère, s’était soulevé contre les Aghlabides ; Í Kairouan et Í Mahdia. Cette pièce fut jouée quarante ans auparavant par la Troupe de la Ville de Tunis. Elle est aujourd’hui remise au goÍ»t du jour par F. Jaziri, grace Í une adaptation du texte initial du dramaturge Ezzeddine Madani. Une projection vers le présent et peut-être vers le futur par le choix de la langue arabe dialectale d’aujourd’hui et par la juxtaposition des faits appartenant Í l’histoire, par ceux vécus par le peuple tunisien durant la révolution du 14 janvier 2011. Fidèle Í une expression théatrale qui privilégie l’espace et la fête, le théatre total et non conventionnel, Fadhel Jaziri revisite le travail textuel et scénique de cette pièce. Elle se joue sur une arène, comme au temps des grecs et des romains. Le public est sur les gradins. Elle réunit pas moins de cent cinquante acteurs professionnels et amateurs. Elle repose sur les effets des lumières, sur l’exploitation de l’espace et sur le chant et la musique, joués en live et puisés des profondeurs de la Tunisie d’aujourd’hui, pour être adaptés Í la musique moderne. Un travail ardu et pas des moindres. La sonorisation, parfois défectueuse ne parvenait pas Í faire entendre la voix des acteurs dans leurs mouvement, paroles et jeu respectif. Cette sono, sans fil, n’avait pas accompagné les ambitions du metteur en scène et de ses comédiens. Même le micro-perche, n’avait pu réaliser ses performances, malgré une apparition surprenante et omniprésente sur scène. N’aurait-il pas fallu jouer sans micro ? L’acoustique de la salle ne le permettait pas certainement. Sur le terrain, ou plutÍ´t sur l’arène du jeu, les tableaux se succédaient Í un rythme parfois soutenu et parfois même très lent. En solo, en duo, en petit groupe, ou en grande masse, les comédiens s’acquitaient, tant bien que mal, dans ce spectacle o͹ l’on perd vite le fil, le chahut des spectateurs aidant et les mauvaises surprises de la sono, pour y revenir. On pourrait imaginer que cette performance a été réalisée en un temps record, pour ne pas dire Í la va-vite, afin de ne point rater le rendez-vous inaugural des JTC. « Saheb Lahmar », la nouvelle version de « Thaouret saheb Al Himar », a évité, dès son intitulé, le mot « révolution ». Pourtant, la pièce projette le passé au présent et semble être dédiée Í la révolution tunisienne, tout comme les JTC qui sont sont placés sous le signe du théatre et de la révolution.
B.L.