
A la recherche d’un détail perdu
La pièce syrienne « Je ne m’en souviens plus » a drainé un public nombreux le 20 octobre au Théatre de l’Etoile du Nord. Pourtant, cette pièce sort des sentiers battus de la création théatrale.
Car pour tenter de reconstituer la biographie d’un musicien et ancien détenu politique, l’auteur et metteur en scène Waël Ali a choisi une réalisation toute simple dépourvue de décor, qui se limite Í une table, Í une chaise et aux deux personnages ceux de Hassan Abderrahmane et Ayham Agha. Ces derniers jouent face Í face sur un carré Í même le sol. Ils sont presque parmi le public qui les entourent sur des chaises et sur un gradin. Au fond de la petite scène, un écran sert Í diffuser des images en off. On y retrouve, tout au début, le personnage principal, celui d’un musicien et détenu politique des années quatre vingt en Syrie qui raconte la fabrication originale du luth, pour aborder, tout de suite, ses années de lutte et d’emprisonnement, de clandestinité, de procès, d’arrestation et de refuge politique.
Le clin d’oeil Í la Syrie de Hafedh et de Bachar Al Assad est clair. Le pays s’est enlisé dans la violence après la révolution de 2011. Sera-t-il vraiment possible de reconstituer la biographie confuse de ce musicien ? Car il montre pendant son long entretien des signes d’oubli total de quelques détails assez importants de son histoire. Cette dernière coͯncide-t-elle avec celle de la Syrie ? Durant soixante quinze minutes, la pièce, ou l’entretien, nous tient dans un cadre assez lourd. La mise en scène inclut l’installation de la caméra et du projecteur pour que l’on suive, par intermittence, le déroulement de l’entretien. Une sorte de descente aux enfers o͹ la mémoire s’effrite, revient et repart. « Je ne m’en souviens plus » interroge la réalité et l’histoire Í partir de celle d’un musicien résistant au régime d’Al Assad.
Le metteur en scène a fait rappeler que la représentation est « la générale » de la pièce elle-même. Si bien que les observations en cours de route seraient les bienvenues, comme lorsqu’il s’agit d’élever la voix. Une pièce révolutionnaire au niveau de sa mise en scène et qui évoque autrement la révolution syrienne.
B.L.