
Avec : Anis Raach, Lotfi Abdelli, Souhir ben Amara, Sofiene Chaari, Mahmoud Larnaout, Fériel Chammari
La première partie du tournage du nouvel opus de Ridha Béhi « Quand tombent les étoiles », alias « Brando and Brando » vient enfin de s’achever. Et c’est sur le magnifique site archéologique de Oudhena, Í 30 kilomètres de Tunis en direction de Zaghouan, que le décorateur Taoufik Béhi a installé le décor principal du film : un village ordinaire comme il en existe tant en Tunisie, un village qui est envahi par une équipe de tournage étrangère exploitant lieux et personnes pour les besoins d’un péplum américain.
L’idée est née de la rencontre de Ridha Béhi et Anis Raach il y a plus d’une dizaine d’années. Cet acteur, qui a une seule et unique expérience cinématographique (« Les Zazous de la vague » de Mohamed Ali Okbi), ressemble comme deux gouttes d’eau Í Brando (voir les photos). Cette étonnante ressemblance a donné naissance Í l’histoire d’un jeune tunisien séduit par James, un acteur américain venu tourner dans un village tunisien et qui lui trouve une ressemblance avec Marlon Brando jeune. Peu de temps après le départ de l’équipe américaine, ce jeune tunisien décide de s’envoler Í son tour pour Los Angeles. LÍ commence l’histoire tendre et mouvementée du jeune tunisien épris de cinéma et de Marlon Brando. L’aventure américaine se termine par la mort de son modèle, qui avait pourtant accepté de le rencontrer, et par son arrestation par le FBI.
Ainsi, au fil du voyage, ses illusions vont se défaire une Í une jusqu’au drame final, inévitable et révélateur de l’impossible rapport avec l’autre et du mirage que constitue le rêve américain.
Le projet a tout de même subi quelques changements afin de contourner un obstacle majeur : la mort inattendue du monstre sacré Marlon Brando qui avait donné son accord de principe au cinéaste tunisien pour camper son propre rÍ´le dans son film.
Pourtant, cette collaboration n’était pas évidente, comme nous le rapporte Ridha Béhi : « Mars 2004. Mulholland Drive. Me voici chez Marlon Brando, moi cinéaste tunisien, quelque peu intimidé du haut de mon mètre soixante-quatre face au monstre en chair et en os, essoufflé et malade mais lucide, tendre et cinglant Í la fois. Tous les deux jours, pendant deux semaines, Brando proposait de nouvelles scènes, en refusait d’autres… Il modifiait les dialogues, la logique même des personnages, allant jusqu’Í suggérer des acteurs. Et pourtant, il ne cesse de me taquiner en me répétant souvent : « Mon cher Ridha ! Tu veux faire un film en Amérique ? J’y vois déjÍ au moins cinq obstacles ! D’abord, tu es arabe et tu ressembles Í un arabe. Ensuite tu parles mal l’anglais. Troisièmement, tu ne connais pas le jazz. Quatrièmement, tu m’as choisi comme acteur, moi, Brando, un vieillard mal en point, le chiffon rouge de l’Amérique bien pensante !… Quant au cinquième obstacle, c’est le plus difficile : tu n’as pas de juif pour t’épauler ici Í Los Angeles… »
Malgré la disparition de la star américaine et le désistement des producteurs étrangers qui se voyaient produire le dernier film de Brando, « Quand tombent les étoiles » verra le jour. Ridha Béhi a déjÍ entamé le montage de ce qui a été tourné en attendant de trouver le budget nécessaire pour les quelques scènes qui lui restent Í tourner Í Los Angeles en juillet.
C’est ainsi que « Brando and Brando » s’est vu transformé en « Quand tombent les étoiles », un docu-fiction, une sorte de carnet de voyage et une évocation de la fiction pour laquelle Brando avait donné son aval et qui fut en fait son dernier projet.